18 juillet 2011

Triathlon olympique de Sherbrooke

Si vous ne le saviez pas, je vous le confirme : le vélo est un sport important dans le triathlon. J’avoue que je n’y accordais pas une grande importance. Pourquoi respecter un sport qui se pratique assis, dites-moi?

J’ai choisi le triathlon de Sherbrooke parce que c’était le seul qui entrait dans mon horaire estival. Pour optimiser ma préparation en vue du marathon de Montréal, j’ai décidé de passer à la distance olympique. Je trouvais que ce serait un bon test d’endurance. Au moment de mon inscription, j’ai eu quelques craintes en raison de la description suivante qu’on peut lire sur le site :

Si vous voulez battre votre record personnel sur la distance olympique, vous êtes au mauvais endroit. Ici, vous goûterez aux panoramas et aux vallons de l'Estrie qui vous couperont le souffle ... littéralement! Si vous voulez vivre quelque chose de différent, vous serez servi.

Pour être servie, j’ai été servie. Non seulement j’ai eu le souffle coupé, mais aussi les jambes sciées. Mon expérience a été traumatisante. Rien de moins!

Dimanche matin, vers 7 h, je suis partie de Montréal en direction de Sherbrooke. Je voulais arriver tôt pour avoir de la place dans le stationnement. (Les retardataires étaient condamnés à se stationner 2,5 km plus loin, ce qui est loin d’être pratique lors d’un triathlon.) Je suis arrivée à temps, j’ai eu une belle place et j’ai tout de suite été charmée par la beauté de l’endroit. Le lac, en particulier, était tout simplement magnifique. En plein le genre de lac dans lequel je rêve de nager depuis toujours. La température était très chaude, alors je me sentais bien. J’avais peur de crever de chaleur dans la portion de course à pied, mais c’était parfait pour la natation. Et ça me semblait acceptable pour le vélo aussi. Après avoir été chercher ma trousse du coureur et découvert avec bonheur que je porterais le numéro 74 – mon année de naissance –, j’ai commencé le long processus de préparation en vue de l’épreuve : organisation de mon stock, gonflage des pneus de vélo, hydratation, alimentation, échauffement dans le lac. Mon amie Caroline est arrivée un peu après moi et, comme à Tremblant, nous étions une à côté de l’autre dans la zone de transition. Il y avait aussi Guillaume pas loin, qui avait l’air détendu et confiant. J’ai pris le temps d’aller voir le départ du super sprint, et derrière moi, il y avait un gars qui disait : « Le parcours de vélo du super-sprint est assez facile. Celui de l’olympique est pour les hommes forts. C’est un parcours de grimpeurs et ça prend des jambes d’acier. » Ça m’a mis la puce à l’oreille, d’autant plus que j’ai entendu d’autres personnes répéter des propos assez similaires plus tard. Mmm… Peut-être que ça allait être un peu trop difficile pour mes capacités actuelles. Mais je voulais donner le meilleur de moi-même et finir mon premier triathlon olympique à tout prix.

Quand je suis entrée dans le lac, j’ai constaté deux choses qui m’ont fait plaisir : l’accès au lac se faisait par une petite plage de sable et il y avait pas mal de vagues (je savais que ça pouvait compliquer les choses, mais c’était si joli). Malheureusement, plus on avançait, plus les pieds s’enfonçaient dans de la vase toute gluante. Ça m’a écœurée alors je me suis vite mise à nager. Pas très facile dans les grosses vagues, mais vraiment trippant. J’étais aux oiseaux et mon stress a diminué de moitié. La température de l’eau était absolument divine. Parfait pour nager. Le wetsuit était interdit en raison de la chaleur, et ça ne me dérangeait pas du tout. Mon échauffement s’est limité à une centaine de mètres de crawl. Il faisait si chaud!

Avant le départ, j’ai attendu environ 5 minutes dans l’eau, un peu paniquée parce que j’avais les pieds dans la vase dégueulasse. J’étais fort impressionnée par Caroline qui était la seule à ne pas se plaindre de l’aspect désagréable de la chose. La vase me rebutait tellement, que je préférais faire de la nage sur place plutôt que d’y toucher avec mes pieds, quitte à dépenser un peu d’énergie. Le signal du départ a finalement été donné, et j’ai commencé à nager. Je m’étais positionnée à l’arrière, et j’y suis restée tout le long. Et pourtant, j’ai vraiment très bien nagé. Je sentais que j’avais une belle technique. J’étais détendue. J’affrontais les vagues avec détermination. Je trouvais ça vraiment facile. J’ai bien avalé de l’eau par le nez à quelques reprises en raison d’un mauvaise synchronisation entre ma respiration et l’arrivée des vagues dans ma face, mais rien de très désagréable. En fait, je nageais dans le bonheur (pour employer un jeu de mot facile). Ça fait des années que je souhaite nager dans un aussi beau et grand lac par une journée chaude d’été, et j’étais en train de le faire! La satisfaction que j’ai ressentie dans le parcours de natation est indescriptible. Pendant cette portion de mon triathlon, je n’étais pas en train de faire une course, je réalisais un rêve d’été. Bon à la fin, j’ai senti mon côté compétitif refaire surface un peu. Il y avait un gars qui nageait à la même vitesse que moi. Je l’ai suivi longtemps, mais vers la fin, il m’a poussée dans la dernière bouée, et j’ai dévié de ma trajectoire. Il m’a ensuite semée le maudit.

Quand je suis sortie de l’eau, j’étais vraiment détendue et j’ai couru pas trop vite jusqu’à la zone de transition. J’ai pris le temps de boire de l’eau et du Gatorade et de manger un jujube PowerBar full blast (merci Trigirl pour la suggestion). J’ai pris mon temps pour mettre mon casque, mes bas et mes souliers à un point tel que Caroline, qui est sortie de l’eau une trentaine de secondes après moi, est repartie avant moi de la zone de transition. Quand je suis arrivée à la ligne de départ de vélo, j’ai voulu placer ma pédale pour pouvoir clipper mon premier pied, mais oups, pédalier bloqué. J’ai crié « ma chaîne est tombée, ma chaîne est tombée », et le bénévole a dit : « remets-la ». J’ai répondu : « je ne sais pas comment! Je ne sais pas comment! » Puis, j’ai jeté un coup d’œil sur ma chaîne. Elle semblait bien en place. Tout semblait normal. J’ai encore essayé de placer ma pédale. Toujours impossible. Je l’ai donc laissée comme ça et j’ai clippé mon pied quand même. J’ai commencé à essayer de pédaler. Ça a fait un bruit de ferraillerie étrange, puis j’ai pu partir et clipper mon autre pied. À peine avais-je résolu ce premier problème que commençait la première montée d’environ 3 kilomètres. L’avantage d’avoir une montée comme ça en début de course, c’est qu’on perd tout de suite ses illusions et qu’on sait qu’on devra impérativement bien gérer son énergie durant la course. Le désavantage, c’est qu’il n’y a déjà plus tellement de gestion à faire, étant donné que le niveau d’énergie est déjà au plus bas. Après cette longue montée, il y avait une très, très longue et abrupte descente de 5 km, je l’ai descendue, effrayée, les mains bien serrées sur les freins. J’avais peur, oui, mais j’étais surtout très démoralisée : la toute première montée m’avait déjà scié les jambes. Comment allais-je pouvoir monter cette côte en toute fin de course (le parcours étant un aller-retour)? Après cette descente, il y a toute de suite eu une deuxième montée de 5 km, que j’ai trouvée quand même plus facile que la première étant donné qu’elle était un peu moins prononcée. Au 13e kilomètre, j’étais à bout de force, légèrement déshydratée, mentalement abattue, et mon dos commençait à me faire beaucoup souffrir. Et puis, il y a eu une courte côte de 12 % qui m’a achevée. Mon dos brûlait, mes triceps (!) brûlaient, mon derrière me faisait déjà très mal et j’avais une douleur abdominale droite inquiétante. Mais au moins, la vue était belle, et j’ai vu des vaches. Il y avait un genre de faux plat montant jusqu’au 20e km. Enfin, c’était le moment de rebrousser chemin. J’ai énormément apprécié le faux plat descendant, mais pas autant que j’aurais pu, car tout mon corps me faisait mal et je commençais à souffrir énormément de la chaleur. Je buvais régulièrement, mais j’avais toujours soif. La sensation de brûlure dans mes triceps et mon dos devenait insupportable. Après une courte montée et une assez longue descente, j’ai entrepris la dernière montée de 5 km (celle que j’avais descendu les mains sur les freins). J’étais complètement épuisée et ma douleur abdominale empirait. Je montais à une vitesse extrêmement lente. Plus lent que ça, tu tombes sur le côté. Mais je ne voulais pas marcher à côté de mon vélo. Jamais de la vie! Alors je montais à 2 km/h. Un policier à moto m’a rejointe et m’a demandé comment j’allais. J’ai éclaté en sanglots en lui disant que j’étais épuisée. Il m’a encouragée et il est resté à côté de moi pour le reste de la montée. Je sanglotais et il me parlait et m’encourageait. Il me changeait même un peu les idées. Il a été mon ange pendant le parcours de vélo. À un moment donné, il m’a dit que le pire était fait et qu’il restait juste une autre montée avant la descente finale. J’étais soulagée. Vers la fin de la montée, j’avais très mal au cœur, et j’ai failli m’arrêter pour vomir. Mais je me suis vraiment retenue. La chaleur était suffocante. Je craignais d’être en train de faire un coup de chaleur et j’ai songé à abandonner mon triathlon après le vélo. Je trouvais la situation dangereuse pour moi. La dernière descente m’a fait beaucoup de bien et c’est avec un immense soulagement que j’ai abandonné mon instrument de torture dans la zone de transition. J’aurais voulu me jeter dans le lac, mais je me suis retenue très fort.

 J’ai décidé de commencer la portion de course en marchant, question de faire descendre un peu ma température corporelle et de maîtriser mes nausées. Le premier kilomètre et demi sur le parcours de course était une grosse côte montante et je l’ai trouvé infernale même si je l’ai gravie en marchant. J’étais à bout de souffle. En marchant. Je pensais à mon marathon, et les pensées négatives fusaient. Je me disais que ces 10 derniers kilomètres correspondaient, en difficulté, aux 10 derniers kilomètres d’un marathon, et que j’étais en train de rater lamentablement la chance que j’avais de m’exercer à endurer l’inconfort. Cela dit, j’étais rendue complètement déshydratée même si j’avais bu de l’eau dans la zone de transition. Il fallait que la zone de ravitaillement arrive bientôt, sinon, j’allais devoir rebrousser chemin. Je savais que je prenais un risque en poursuivant cette course dans cet état. Un coup de chaleur n’est pas à prendre à la légère. Comme pour confirmer mes craintes, j’ai croisé un coureur couché au sol entouré de l’équipe de premiers soins. Il s’était effondré en courant. L’ambulance est arrivée peu après. Heureusement, j’ai aperçu le point d’eau non loin devant moi. Et, oh bonheur, il y avait un petit gars pour nous arroser à l’eau fraîche. C’était merveilleux! Je me suis sentie un peu mieux après. J’ai bu de l’eau et j’ai été capable de prendre un gel GU chocolat-menthe. Ce fut un test concluant en vue de mon marathon, car j’ai trouvé ce gel délicieux et facile à avaler malgré mon mal de cœur. Après cette première station d’eau, j’ai été capable de commencer à courir. Quand je courais, au moins c’était à un bon rythme, probablement en bas de 6 minutes/km. Pour économiser mon énergie le plus possible, j’ai cependant marché dans toutes les montées. Je crois que cette stratégie m’a permis de terminer ma course en santé. Le retour a assez bien été. C’était surtout de la descente, alors j’ai pu me laisser aller en courant. C’était presque fini. J’étais soulagée.

À l’arrivée, j’ai constaté que le site était en train d’être démonté. Les barrières de la zone d’arrivée étaient presque toutes enlevées. J’ai senti que je n’avais vraiment pas été à la hauteur de cette compétition et je me sentais profondément humiliée. J’ai éclaté en sanglots. Et j’ai été déçue qu’ils ne remettent pas de médaille à la fin comme c’est le cas dans certaines compétitions difficiles. Mon seul accomplissement avait été de ne pas avoir abandonné. J’avais besoin d’un symbole pour le souligner.

J’ai pleuré hystériquement pendant une bonne minute. J’étais déçue et épuisée. Puis je me suis rappelé que Caroline n’était pas loin derrière moi et je me suis précipitée pour applaudir son arrivée. Elle avait sûrement souffert autant que moi, et je tenais à la féliciter. Elle est arrivée toute souriante et heureuse. J’ai trouvé qu’elle avait une superbe attitude, et j’aurais voulu être capable de faire comme elle. Je vais essayer de m’en inspirer pour les prochaines fois.

J’ai enfin pu me jeter dans le lac et y détendre mes muscles endoloris, après quoi je suis allée assister à la remise des médailles. C’était long compte tenu du nombre élevé de catégories. J’avais soif, alors j’ai entrepris de me rendre à la fontaine qui se trouvait à quelques mètres. Étrange combien la notion de distance change en fonction de l’état de fatigue. Ça m’a paru loin! Après avoir bu, je me suis laissé tomber sur un banc et j’ai mis ma tête entre mes jambes, car j’étais étourdie. C’est à ce moment que j’ai entendu mon nom. Troisième place dans la catégorie Femmes 35-39 ans. Il n’y avait que 3 participantes dans cette catégorie, mais tassez-vous de d’là j’la veux ma médaille. J’allais finalement obtenir le symbole dont j’avais tant besoin.

D’habitude mes médailles aboutissent dans le fond d’un tiroir. Celle-là est suspendue à la poignée de porte de mon bureau. Bien en vue.

Hier j’étais amèrement déçue, mais ma déception a cédé la place à une grande fierté. Cette course a été la plus difficile de toute ma vie. Plus difficile que mon premier marathon.

Je vais toujours me rappeler mon premier triathlon olympique.

Hier, je ne pensais jamais que j’allais dire ça, mais l’an prochain, beaucoup de vélo, beaucoup de triathlons de toutes distances et, à la fin de l’été : demi-Ironman.

Je crois bien que le vélo a gagné mon respect.

5 juillet 2011

Ça va bien!

Je tiens mes promesses.

Dans un message précédent, j’affirmais que ma préparation en vue de mon deuxième marathon serait bien plus rigoureuse que pour le premier. Jusqu’à présent, je respecte rigoureusement le plan. Et je constate déjà avec émerveillement les résultats. Je suis en forme. Pour le moment, je travaille beaucoup ma vitesse sur des distances moyennes allant de 8 à 16 km. La semaine dernière, j’étais en vacances dans les Laurentides et en Gaspésie, et j’ai dû affronter de grosses côtes dans tous mes entraînements. Malgré tout, je suis parvenue à respecter les vitesses demandées sans le moindre problème. J’arrive à souffrir plus longtemps sans trop m’en faire. Je me sens forte quelles que soient les conditions : humidité, chaleur, côtes, vent, pluie diluvienne.

Je m’entraîne en général six jours par semaine : 4 entraînements de course à pied, un entraînement de natation et un entraînement de vélo. Après mon triathlon olympique, qui a lieu dans deux semaines, je me concentrerai presque seulement sur la course à pied. Mes distances de course vont alors augmenter de plus en plus. C’est avec beaucoup de confiance et d’enthousiasme que j’envisage mon deuxième marathon. J’espère le courir à un bon rythme celui-là.

J’ai commencé à réfléchir à mon prochain défi post-marathon, car je ne veux pas vivre de grosse baisse de motivation comme l’an dernier. L’un de mes rêves est de courir un demi-marathon en moins de 2 h, et je crois que ce serait un objectif très réaliste pour cet automne. Si tout va bien, je m’inscrirai au demi-marathon de Philadelphie. Je l’avais couru en 2 h 05 en 2009. Si j’arrive à éviter les blessures d’ici là, je devrais être capable de passer sous les deux heures, car je serai en forme plus que jamais.

En ce moment, il fait 33 degrés avec le facteur humidex, et je m’apprête à sortir pour mon entraînement d’aujourd’hui : 8 km avec 2 km au demi-train (vitesse du 10 km) immédiatement suivis de 1 km au train (vitesse du 5 km). Un autre entraînement qui sera sans doute payant!